Trois clés pour une coopération transfrontalière réussie dans le domaine de l'eau en Afrique Blog du programme CIWA  

Posté le : 28 mai 2025

M. Riek présentant leur travail durant les trois mois de stage à ENTRO, janvier 2025.  Crédit photo : Danielle Monsef Abboud/ Banque mondiale 

L'explosion démographique, la dégradation de l'environnement et la variabilité croissante du climat aggravent les problèmes liés à l'eau en Afrique subsaharienne. L'impact des phénomènes météorologiques extrêmes dépassant souvent les frontières nationales, la coopération régionale est essentielle pour y faire face.  

Le Programme régional de résilience climatique (PRRC) de la Banque mondiale, d'un montant de $620 millions d'euros, apporte un soutien à cinq pays - les Comores, Madagascar, le Malawi, le Mozambique et le Soudan du Sud - et à trois organisations régionales d'Afrique orientale et australe.Bureau régional technique du Nil oriental (ENTRO), le Communauté de développement de l'Afrique australeet le Commission de l'Union africaine-Le programme de coopération en matière d'eaux internationales en Afrique (CIWA), qui vise à améliorer la préparation à ces événements, est une approche novatrice qui montre qu'une gouvernance transfrontalière efficace de l'eau peut renforcer la résilience tout en favorisant la stabilité régionale.  

À la lumière de notre expérience des initiatives réussies en Afrique de l'Est et en Afrique australe, trois principes apparaissent comme essentiels pour stimuler la coopération régionale dans le domaine de l'eau. 

Clé 1 : Construire des systèmes nationaux solides avant de lancer des solutions régionales 

Les collaborations régionales les plus efficaces commencent par le renforcement des capacités de chaque pays. Le PCRR adopte une approche unique de la gestion des eaux transfrontalières en renforçant d'abord les systèmes nationaux. Cela signifie qu'il faut renforcer les capacités, soutenir la planification et l'élaboration des politiques, et mettre en œuvre des solutions nationales de gestion des ressources en eau.  

Au Sud-Soudan, cette approche a transformé la préparation aux inondations. L'ENTRO fournit une assistance technique au secteur émergent des ressources en eau du Soudan du Sud tout en facilitant la collaboration avec l'Éthiopie et l'Ouganda sur les défis communs liés aux inondations. Pendant la saison des inondations de 2024, les alertes coordonnées de l'ENTRO, du Programme d'action subsidiaire pour les lacs équatoriaux du Nil (NELSAP) et de la Task Force sur les inondations du Sud-Soudan ont bénéficié à plus de 735 000 résidents de zones sujettes aux inondations, qui ont pu se déplacer vers des terrains plus sûrs et sauver leur bétail. 

En renforçant leurs propres systèmes nationaux, le Mozambique et le Malawi sont en mesure de relever des défis communs dans le bassin de la rivière Shire, où les dommages causés à l'environnement au Malawi exacerbent les inondations en aval au Mozambique. Le financement du PCRR soutient les interventions de gestion des bassins versants et les solutions en amont pour réduire les risques d'inondation au Malawi, tandis qu'en aval, au Mozambique, il finance l'infrastructure de gestion des risques d'inondation. La ratification prévue par le Malawi de la Commission du cours d'eau du Zambèze renforcera encore cette collaboration. 

Clé 2 : Obtenir l'adhésion locale grâce à l'engagement communautaire 

Même les solutions techniques les plus sophistiquées peuvent échouer sans le soutien de la communauté. L'expérience du bassin versant de la rivière Unyama, où les inondations ont perturbé le commerce transfrontalier entre le Sud-Soudan et l'Ouganda, montre les avantages de la consultation des communautés. 

Lorsque les consultants du NELSAP chargés d'élaborer un plan de gestion des inondations pour le bassin transfrontalier de l'Unyama se sont heurtés à la résistance de résidents incertains des intentions du projet, ils ont collaboré avec le ministère des Ressources en eau et de l'Irrigation du Sud-Soudan pour lancer un processus de consultation. Des représentants ont rencontré les communautés au niveau national à Juba, au niveau de l'État à Torit et au niveau local à Nimule pour expliquer les avantages d'un plan transfrontalier coordonné, notamment la protection des vies et des moyens de subsistance contre les inondations en provenance de l'Ouganda. Cette approche a transformé le scepticisme en soutien, permettant au plan de gestion des inondations d'aller de l'avant. 

Clé 3 : Investir dans les capacités humaines et le leadership futur 

Une gouvernance durable de l'eau nécessite une expertise locale. Le programme de stages d'ENTRO a formé plus de 51 professionnels de l'eau sud-soudanais à la gestion de l'eau, à la technologie de télédétection utilisant des images satellites pour la collecte de données sur l'eau, aux systèmes d'information géographique (SIG) pour la collecte et l'analyse de données spatiales sur les ressources en eau, et à la modélisation hydrologique.  

Longa Seme Isaiah, aujourd'hui analyste SIG et données au ministère de l'eau du Sud-Soudan, est devenu un véritable adepte des avantages de la collaboration régionale. Au cours de son stage ENTRO, il s'est concentré sur l'analyse des risques d'inondations transfrontalières et sur la gestion de l'eau basée sur des données. Aujourd'hui basé au centre hydrométrique de Juba, il a contribué à réduire les erreurs de prévision des inondations de 53%. 

"Cette expérience m'a montré le pouvoir de la coopération régionale et m'a inspiré un engagement plus profond en faveur de solutions partagées dans l'ensemble du bassin du Nil", a déclaré M. Isaiah. 

Au-delà de la formation, la CIWA a lancé des initiatives complémentaires, notamment le projet de renforcement des organisations de bassins fluviaux transfrontaliers et le programme de soutien aux eaux transfrontalières du Sud-Soudan. Le premier s'attaque à la baisse des niveaux d'eau du lac Kariba, qui a créé des tensions entre la Zambie et le Zimbabwe en raison de divergences politiques concernant la pêche. 

VIDÉO | Pionnière de la résilience climatique dans la gestion de l'eau en Afrique : Entretien avec Laura Bonzanigo, spécialiste principale de la gestion des ressources en eau à la Banque mondiale, qui dirige le programme régional de résilience climatique (RCRP).

La voie à suivre 

Le partenariat entre le RCRP et le CIWA représente une approche globale de la gouvernance de l'eau qui prend en compte les dimensions techniques, sociales, économiques et politiques. En se concentrant sur ces trois éléments clés, ces programmes créent des systèmes de gestion de l'eau capables de résister à la variabilité climatique tout en réduisant les tensions transfrontalières. 

En travaillant ensemble, les pays voisins peuvent relever des défis environnementaux complexes. Alors que le changement climatique continue d'avoir un impact sur les ressources en eau au niveau mondial, l'application de ces trois clés sera de plus en plus vitale pour la gestion durable de l'eau et la stabilité régionale dans toute l'Afrique et au-delà. 

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