La prochaine génération de professionnels de l'eau oeuvre en faveur d'une nouvelle ère de coopération

Posté le : 13 décembre 2022

Le Nil, qui est partagé par 11 pays, incarne à la fois les difficultés et les nombreuses possibilités que présente la gestion d’une ressource dont dépendent plus de 230 millions d’habitants appartenant à une grande variété de cultures, de paysages et de communautés.

La région du Nil oriental est complexe. Les subtilités politiques, culturelles et historiques y prennent souvent le pas sur les solutions techniques nécessaires à une coopération transfrontalière efficace en matière de gestion et de mise en valeur des cours d’eau.

Depuis 2011, le Bureau technique régional du Nil oriental (ENTRO), qui fait partie de l’Initiative du bassin du Nil (IBN), gère, en partenariat avec le programme de Coopération pour les eaux internationales en Afrique (CIWA), un programme de stages¹ destiné à la prochaine génération de talentueux professionnels de l’eau dans la région du Nil oriental. Ce programme vise avant tout à promouvoir la coopération transfrontalière et à constituer un espace de collaboration novateur et avant-gardiste composé de jeunes experts. Son objectif est de surmonter les divisions et les différends historiques et régionaux et d’adopter une approche véritablement collaborative, durable et adaptée au changement climatique de la gestion des eaux transfrontalières dans le bassin du Nil oriental.

Le travail en équipe de professionnels issus de milieux culturels et universitaires divers offre la possibilité d’une collaboration sans précédent.

Le programme de stage, qui a accueilli plus de 180 stagiaires depuis sa création, se caractérise par une multitude d’activités de projet visant à transformer la gestion des ressources en eau dans le Nil oriental. Il s’agit par exemple d’encourager la collaboration entre les universités du Nil oriental, de favoriser la collaboration sur les questions hydropolitiques régionales, d’élaborer des outils pour enrichir la base de connaissances et de connecter les réseaux professionnels regroupant des praticiens de l’eau, des décideurs et d’autres acteurs du secteur dans toute l’Afrique et au-delà.  Le programme vise principalement à renforcer les capacités. Il ne s’agit pas seulement de perfectionner certaines compétences, ou d’en acquérir de nouvelles, mais également de faire évoluer les points de vue et de promouvoir une culture de collaboration impartiale, privilégiant une approche holistique des systèmes afin de trouver des solutions aux problèmes régionaux complexes liés à l’eau, qui transcendent les frontières politiques.

Ce programme permet à des stagiaires d’horizons très divers de bénéficier d’une plateforme. Il s’agit notamment d’ingénieurs hydrauliques, de géologues, de spécialistes de l’environnement et de spécialistes de la communication venus des pays du bassin du Nil oriental (Égypte, Éthiopie, Soudan et Soudan du Sud). Le programme de stages d’ENTRO, qui compte plus de 21 % de femmes parmi ses stagiaires, contribue à donner aux femmes les moyens de réussir et d’innover dans un domaine traditionnellement dominé par les hommes. Les stagiaires sont sélectionnés sur la base de leurs travaux de recherche, des distinctions obtenues et de leur spécialisation technique. Outre leur expertise technique, chacun de ces stagiaires apporte une perspective régionale unique sur le Nil.

Le projet pour la résilience climatique dans le bassin du Nil (NCCR), lancé en 2021, vise à améliorer les mécanismes de coopération liés à la gestion et à la mise en valeur des ressources en eau dans le bassin du Nil. Il concentre les efforts sur la mise en place d’une plateforme dédiée à la coopération, à l’atténuation des risques d’inondation et de sécheresse, au renforcement des capacités en matière de sécurité des barrages, aux services d’information innovants pour la planification des investissements résilients au climat et à la planification des investissements dans la qualité de l’eau.

« C’est un important programme de renforcement des capacités pour les jeunes experts. Il m’a permis d’améliorer mes aptitudes intellectuelles et sociales et d’élargir mon réseau. Le programme m’a beaucoup aidé à orienter la préparation de mes futures études de doctorat et ce que je voulais en retirer. »

Ethiopia Bisrat, Promotion 2018, Éthiopie, Ingénieure environnementale

« Il s’agit d’une chance unique de découvrir d’autres cultures, de nouveaux enjeux et de nouvelles perspectives sur les eaux transfrontalières ».

Mohamed Tawfik, Promotion 2022, Égypte, Spécialiste en gestion des ressources en eaux

Évolution du programme de stage d’ENTRO de 2021 à 2022 et aperçu des activités de ce programme.

Le programme de stage d’ENTRO, qui s’inscrit dans le cadre de la coopération pour la résilience climatique dans le bassin du Nil (projet NCCR)¹, a lancé des cycles de recrutement pour deux promotions de stagiaires entre 2021 et 2022, chacune poursuivant un objectif spécifique. La première promotion s’est penchée principalement sur la question de la prévision des inondations et des services d’alerte précoce, tandis que la seconde (mars-juin 2022) a travaillé sur le thème de la coopération sur les eaux transfrontalières.

Le renforcement des capacités ne peut se faire sans stimuler l’émergence d’un changement transformationnel significatif et durable qui ne se limite pas aux politiques et aux pratiques, mais qui vise à changer les mentalités et les attitudes. Cette démarche est au cœur de la philosophie de CIWA et du programme de stage d’ENTRO, qui consiste à forger des partenariats interculturels, transnationaux et transfrontaliers propices au changement et à l’innovation.

« J’ai acquis de nombreuses compétences dans le domaine de la modélisation hydrologique et hydraulique. Après ce programme, j’ai commencé à travailler en tant qu’ingénieur en ressources hydrauliques et à proposer des possibilités de gestion des risques liés aux crues. »

Ahmed Nasr, Promotion 2013, Égypte, Ingénieur hydrologue

« Avant de commencer mon stage à ENTRO, je ne me préoccupais que du point de vue de mon propre pays. Travailler aux côtés de stagiaires de quatre autres pays du bassin du Nil oriental m’a permis d’adopter une vision plus régionale ».

Safa Abdalwhab, Soudan, ministère de l’Irrigation et des Ressources en eau

Le blog publié par CIWA il y a deux ans à l’occasion de la Journée mondiale des compétences des jeunes mettait à l’honneur la promotion de stagiaires 2019-2020 d’ENTRO. La promotion 2022 a participé à de nombreuses activités (voir diagramme), notamment à des séminaires en ligne et à des ateliers collaboratifs sur des sujets comme le dialogue intergénérationnel sur la diplomatie de l’eau organisé avec l’UPWCD et la gouvernance pour la sécurité de l’eau douce avec le GWP (Global Water Partnership). Ils ont également eu la possibilité de présenter leurs idées et leurs points de vue sur certains problèmes liés à l’eau, à titre individuel ou en groupe, ce qui a contribué à instaurer une culture de collaboration et de communauté qu’ils pourront mettre à profit au cours de leur vie professionnelle.

« Cette expérience m’a permis d’établir un réseau et de débattre avec des intellectuels brillants de tous les pays du bassin du Nil oriental. Pas uniquement avec les stagiaires, mais aussi avec le personnel d’ENTRO originaire d’Éthiopie ou d’ailleurs ».

Mohamed Tawfik, Égypte, Spécialiste en gestion des ressources en eaux

« La jeune génération est amenée à occuper des postes à responsabilité dans le secteur de l’eau et à évoluer de manière conviviale pour résoudre ensemble les problèmes liés à l’eau ».

Jale Yuggu, Soudan du Sud, ministère des Ressources en eau et de l’Irrigation

Hamad donne une conférence sur les efforts de coopération transfrontalière dans le bassin du Nil oriental, dans le cadre des projets individuels réalisés par les stagiaires.

Prochaines étapes

ENTRO prévoit de lancer le recrutement de nouvelles promotions de stagiaires en 2022-2023 dans le cadre du projet de coopération pour la résilience climatique dans le bassin du Nil. Les stagiaires travailleront sur des thèmes multidisciplinaires qui revêtent une importance cruciale pour le développement et la gestion des ressources en eau dans le bassin du Nil oriental. ENTRO prévoit par ailleurs de tirer parti de l’expérience acquise au cours des dix dernières années pour préparer un document d’orientation sur le programme de stages. Ce dernier servira de référence pour le recrutement des futurs stagiaires et des jeunes professionnels et permettra de soutenir la mise en œuvre du programme. D’autres centres, comme le Discours du bassin du Nil (NBD), pourront l’utiliser afin d’harmoniser leurs propres directives sur celles du programme de stages et de jeunes professionnels de l’IBN.

Selon M. Elias Tedla, coordinateur des stages à ENTRO, « les dix ans d’existence du programme (de stages) permettent non seulement de renforcer les réseaux et les partenariats professionnels multisectoriels, mais aussi de favoriser la communication et le mentorat intergénérationnels entre les différentes promotions de stagiaires. »

ENTRO prévoit d’organiser des ateliers à l’intention des anciennes promotions et de lancer une plateforme de médias sociaux permettant à tous les stagiaires, passés et futurs, de se connecter à un portail dédié aux anciennes promotions, leur offrant ainsi la possibilité de nouer des relations professionnelles et de travailler en réseau avec leurs homologues de la région du Nil oriental. Le programme projette par ailleurs l’élection de représentants attitrés pour chacun des quatre pays de la région. Ils seront chargés de l’organisation et des échanges avec les stagiaires et resteront en communication directe avec ENTRO.

Le programme de stages a d’ores et déjà largement contribué à doter la prochaine génération de professionnels de l’eau de la région du Nil oriental des compétences et des outils nécessaires pour appliquer leurs connaissances en temps réel. Il a également permis de créer une plateforme permettant de travailler sur les problèmes complexes et multisectoriels des ressources en eau de la région, et de contribuer à la mise en place d’une coopération fructueuse sur les eaux transfrontalières.

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1 Le blog publié par CIWA il y a deux ans à l’occasion de la Journée mondiale des compétences des jeunes mettait à l’honneur la promotion 2019-2020 des stagiaires de l’ENTRO.
2 Le projet pour la résilience climatique dans le bassin du Nil (NCCR), lancé en 2021, vise à améliorer les mécanismes de coopération liés à la gestion et à la mise en valeur des ressources en eau dans le bassin du Nil. Il concentre les efforts sur la mise en place d’une plateforme dédiée à la coopération, à l’atténuation des risques d’inondation et de sécheresse, au renforcement des capacités en matière de sécurité des barrages, aux services d’information innovants pour la planification des investissements résilients au climat et à la planification des investissements dans la qualité de l’eau.

 

Anders Jägerskog, spécialiste de la gestion des ressources en eau au pôle mondial d’expertise en Eau de la Banque mondiale, et responsable du programme CIWA, Bio

Shyam KC, Spécialiste principal en gestion des ressources en eau, Bio

Yukio Tanaka, Spécialiste principal en gestion des ressources en eau,  Bio

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